La chambre criminelle de la Cour de cassation a renvoyé au Conseil constitutionnel deux QPC visant les articles 543 al. 1er et 800-2 du Code de procédure pénale (aff. n° 2021-910 QPC) et les articles 536 al. 1er et 541 du Code de procédure pénale (aff. n° 2021-909 QPC). Elle estime que l'absence de recours ouvert au prévenu cité directement par la partie civile puis finalement relaxé, pour obtenir la condamnation de la partie civile au paiement de dommages et intérêts et au remboursement de ses frais irrépétibles est susceptible de porter atteinte au droit à un procès juste et équitable dans la mesure où ces recours sont ouverts à la partie civile.
Sur l'absence de recours pour obtenir la condamnation de la partie civile au paiement de dommages et intérêts
Dans la première décision (n° 20-90.032), la Cour de cassation relève que contrairement au régime applicable devant le tribunal correctionnel, aucune disposition ne permet, devant le tribunal de police, à la personne poursuivie citée directement par la partie civile et qui a fait l'objet d'une relaxe, de solliciter la condamnation de cette partie civile au paiement de dommages-intérêts. La partie civile peut pourtant, en cas de condamnation de la personne poursuivie, obtenir de cette même juridiction, des dommages-intérêts.
La Cour de cassation estime que ces dispositions sont susceptibles d'affecter l'équilibre entre les parties au procès pénal et de porter ainsi atteinte au droit à un procès juste et équitable (DDHC, art. 6 et 16).
Sur l'absence de recours pour obtenir le remboursement des frais de défenses non pris en charge par l'État
Dans la seconde décision (n° 20-90.033), la Cour de cassation relève qu'en raison de l'abrogation de l'article 800-2 al. 1er du CPP à compter du 31 mars 2020, toute personne poursuivie, devant le tribunal de police, pénalement ou civilement responsable, qui a fait l'objet d'une relaxe, est privée du droit de demander le remboursement des frais non payés par l'État et qu'elle a exposés pour les besoins de sa défense. Alors que le CPP prévoit que devant le tribunal de police, l'auteur de l'infraction ou la personne condamnée civilement peut être condamné par le tribunal à payer à la partie civile la somme qu'il détermine au titre des frais non payés par l'État et exposés par elle.
Pour rappel, le Conseil constitutionnel a déclaré que l'impossibilité pour une personne mise hors de cause, citée devant la juridiction pénale comme civilement responsable, de solliciter la condamnation de la partie civile aux paiements des dommages-intérêts et des frais non payés par l'État, portaient atteinte à l'équilibre des parties dans le procès pénal (Cons. const., 5 avr. 2019, n° 2019-773 QPC). L'abrogation de ces dispositions avait été reportée au 31 mars 2020, eu égard aux conséquences manifestement excessives – notamment la suppression pour la personne poursuivie et la personne civilement responsable du droit de se voir accorder des frais irrépétibles en cas de non-lieu, de relaxe, d'acquittement. Mais le législateur n'est pas intervenu pour modifier cette disposition.
La Cour de cassation juge donc que ces dispositions sont susceptibles d'affecter, les droits de la défense et l'équilibre entre les parties au procès pénal et ainsi, porter atteinte au droit à un procès juste et équitable (DDHC, art. 6 et 16). Elle décide de renvoyer, à nouveau, une QPC sur cette question.
Source lexis-Nexis
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