L’avocat du CPDH, maître Henri de Beauregard, a demandé au Ministère de l’Intérieur de lui communiquer les arguments scientifiques qui prouveraient que les risques de contamination seraient plus élevés dans une église respectant les protocoles sanitaires que dans les commerces, ou dans les files d’attente sur les trottoirs. Il a expliqué au juge que la restriction en valeur absolue du nombre de fidèles dans une église, sans tenir compte des surfaces disponibles, laissaient les responsables religieux dans une totale incompréhension. A ce sujet, le juge a questionné par trois fois la représentante du Ministère de l’Intérieur – Mme Léglise - qui a été incapable de justifier le chiffre de 30 fidèles maximum admis dans une église et qui a fini par déclarer : « Je ne sais pas comment cette jauge a été calculée ». Elle a également ajouté qu’il suffisait de faire plusieurs messes ou plusieurs cultes (de 30 personnes) le dimanche ou bien de les répartir sur plusieurs jours pour être en capacité d’accueillir plus de fidèles.
Aux intervenants qui ont regretté l’absence d’une case à cocher autorisant à se rendre à son lieu de culte, sur les « attestations déplacement », Mme Léglise a déclaré que « cela n’a jamais posé problème et que le gouvernement avait eu l’occasion de clarifier ce détail avec les autorités catholiques, que c’était superfétatoire et qu’il suffisait de cocher la case « déplacement pour motif familial impérieux » ». Franck Meyer a demandé la parole à ce sujet pour indiquer au gouvernement que les chrétiens sont des citoyens respectueux des autorités, ils prient d’ailleurs pour elles, et que si l’Etat n’indique pas clairement qu’il autorise les déplacements à l’église ou au temple, ils obéiront et que de plus ils refuseront de cocher un mobile mensonger. Ce « détail » a finalement été corrigé dans la nouvelle attestation de déplacement.
Les pasteurs et les croyants comprennent bien la nécessité de lutter contre la propagation du coronavirus, et de stricts protocoles sanitaires ont été mis en place pour cela. Mais concernant les différences de traitement entre les commerces et les églises, Franck Meyer a désiré ajouter que si le Christ s’était donné la peine de déclarer que « l’homme ne vivra pas de pain seulement, mais de toute parole qui sort de la bouche de Dieu », c’est bien parce que les besoins moraux et spirituels de l’être humain doivent être aussi pris en compte, il ne suffit pas d’offrir « du pain et des jeux » (fussent-ils virtuels pour ces derniers). Quant à l’organisation de plusieurs offices religieux successifs de 30 personnes à la fois, Franck Meyer a rappelé les difficultés que cela représente en matière de désinfection des locaux avant l’accueil d’un nouveau groupe de fidèles.
« Le référé-liberté est une procédure qui permet de saisir en urgence le juge administratif, lorsqu’on estime que l’administration (État, collectivités territoriales, établissements publics) porte atteinte à une liberté fondamentale (liberté d’expression, droit au respect de la vie privée et familiale, droit d’asile, etc.). Le juge des référés a des pouvoirs étendus : il peut suspendre une décision de l’administration ou lui ordonner de prendre des mesures particulières. Pour cela, il doit pouvoir établir, d’une part, qu’il y a urgence à statuer, d’autre part, que l’administration – par ses actions ou son inaction – a porté une atteinte grave et manifestement illégale à une liberté fondamentale. Le juge porte son appréciation sur ce point compte tenu des mesures déjà prises par l’administration et des moyens dont elle dispose. Le juge des référés rend ses décisions en principe sous 48h. »[1]
Entendu samedi 28 novembre à 15h, le CPDH a développé plusieurs arguments montrant que plusieurs mesures décidées par le gouvernement, en matière de lutte contre l’épidémie de coronavirus, portaient atteinte à la liberté de culte et comportaient des dispositions discriminatoires par rapport à la liberté du commerce et de l’industrie. Cette dernière liberté a été favorisée par le gouvernement par rapport à la liberté de culte.
Dimanche 29 novembre, le Conseil d’Etat a rendu l’ordonnance suivante : « Il est enjoint au Premier ministre de modifier, dans un délai de trois jours à compter de la notification de la présente ordonnance, en application de l’article L. 3131-15 du Code de la santé publique, les dispositions du I de l’article 47 du décret n° 2020-1310 du 29 octobre 2020, en prenant les mesures strictement proportionnées d’encadrement des rassemblements et réunions dans les établissements de culte ». Ceci parce que le juge a estimé qu’il y avait deux poids deux mesures entre la réouverture de tous les commerces et la réouverture des églises, après un mois de confinement sanitaire.
Le CPDH était « requérant en intervention », avec les Associations Familiales Catholiques, et avait sollicité un avis du Conseil d’état en la matière.
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